Video Observer : le troisième volet des Observers

09/12/2019
8 min

Ces deux dernières années, IP a mené une série de trois études budget-temps, que nous avons nommées « Observers » et qui détaillent le comportement média des Belges par ¼ d’heure.

La plus importante d’entre elles, le Life Observer (2018), observe 54 activités de la vie courante. Celle-ci permet, entre autres choses, de calculer le temps consacré aux médias en Belgique, soit 10 heures 32 minutes par jour ! Ce temps des médias a significativement augmenté par rapport à il y a 10 ou 20 ans, surtout à cause des réseaux sociaux qui ont remplacé en grande partie le temps passé en compagnie de parents ou d’amis à l’extérieur du domicile. Le Life Observer nous apprend qu’environ un tiers du « temps média » est réalisé par la radio, un second tiers par la télévision, et un sixième par internet. Le reste se partage entre les réseaux sociaux, la presse, le streaming…
À côté du Life Observer, nous avons voulu, au travers de deux autres études, sonder plus en détail l’audio et la vidéo dans toutes leurs composantes. Ainsi, l’Audio Observer (2017) décrit neuf types d’audio allant de la FM au streaming, en passant par les podcasts, sites, applications… Et cette année, nous complétons l’analyse avec le Video Observer qui détaille les comportements de vision.

Méthodologie du Video Observer

L’étude a été réalisée pour IP Belgium par Kantar TNS, en octobre 2018, auprès d’un échantillon online de 2500 individus de 18 à 64 ans, représentatif de la population belge par région, sexe, âge et groupes sociaux, selon les standards du CIM. Par ailleurs, les interviews ont été réparties équitablement sur les 7 jours de la semaine de façon à bien retracer des comportements média qui diffèrent en semaine et le weekend.
Les interviewés ont dû reconstituer tous leurs moments de vision de la veille par ¼ d’heure, en précisant le type de vidéo, le « device » (écran, smartphone…), le lieu, et s’ils regardaient seuls ou en compagnie de quelqu’un.
9 types de vidéo sont recensés :

  1. télévision en direct

  2. télévision enregistrée

  3. télévision en « replay » sur un site ou une app

  4. service payant de vidéo à la demande

  5. DVD

  6. vidéos courtes sur internet

  7. vidéos sur les réseaux sociaux

  8. films ou séries téléchargés

  9. cinéma

Les types de vidéo regardés en Belgique

Grâce au Video Observer, il est désormais possible de calculer le « share of eye » de la Belgique. Les Belges regardent en moyenne 4 heures 46 minutes de vidéo par jour. 71 % de ce temps de vision se compose de programmes de télévision (TV en live 49 %, TV enregistrée 19 %, TV en replay 3 %). Après la télévision, on retrouve 9 % pour les vidéos courtes sur internet, 7 % pour le « on demand » payant, 6 % pour les films ou séries downloadés et 5 % pour les vidéos sur les réseaux sociaux. Les DVD ne représentent que 2,5 %, et le cinéma moins de 1 %.

Les deux grandes communautés du pays, les néerlandophones au Nord et les francophones au Sud, adoptent des comportements assez différents. La durée de vision est plus faible au Nord, avec une part conséquente accordée à la télévision plutôt qu’aux nouvelles plateformes. La télévision en « timeshift » y est particulièrement importante si on la compare au Sud.

En revanche, le Sud est plus digital, dédiant plus de temps aux vidéos sur internet ou au download de films et séries. Le temps total de vision est également beaucoup plus conséquent au Sud (5 heures 7 minutes) qu’au Nord (4 heures 28 minutes), mais avec un poids équivalent dans les deux zones du pays pour la télévision. En effet, le temps supplémentaire passé par les francophones à regarder des vidéos sur des plateformes digitales (39 minutes quotidiennes) vient s’ajouter, sans réduire l’importance du temps consacré à la télévision.

Les différences entre les hommes et les femmes étaient attendues. Comme dans d’autres études, les hommes sont plus sélectifs sur les nouvelles technologies, et donc les vidéos apparentées.

Les groupes sociaux populaires (5 à 8) sont de plus grands consommateurs de vidéo que les groupes sociaux supérieurs (1 à 4), avec une heure de vision quotidienne supplémentaire. On ne note cependant pas de fracture sociale dans leurs choix de plateformes, les deux groupes regardant dans des proportions équivalentes les différents types de vidéo (télévision, replay, réseaux sociaux…).

L’âge est, sans surprise, le facteur le plus différenciateur. Les plus jeunes de notre échantillon, les 18 à 24 ans, se démarquent plus particulièrement des générations qui les précèdent. N’étant pas encore dans la population active, il est assez normal que ce groupe adopte des comportements média très spécifiques. Ils regardent beaucoup de vidéos courtes sur internet (21 % du temps de vision) ou sur les réseaux sociaux (9 %), mais ne renient pourtant pas la télévision en live, en timeshift ou en replay (45 %). Ces comportements changent dès l’entrée dans la vie active. Ainsi les jeunes actifs de 35 à 44 ans adoptent-ils un comportement tout autre, et marquent beaucoup plus d’intérêt pour la télévision en live ou en différé (73 %).

L’analyse par ¼ d’heure de ces comportements permet de dessiner des courbes d’audience par type de vidéo. La courbe générale suit pour la télévision une forme connue, avec un pic très important en soirée, alors que les vidéos sur internet ou les réseaux sociaux présentent un profil beaucoup plus étalé tout au long de la journée. 

Générations

Si l’âge demeure le facteur le plus différenciateur, une question revient souvent : « Nos comportements sont-ils dirigés par notre appartenance générationnelle et allons-nous changer en vieillissant ? Ou bien les comportements d’une génération se transmettent-ils aux suivantes au fur et à mesure que nous vieillissons ? » Un peu des deux sans doute, car d’une part le monde évolue, et les nouveaux adultes ne perdront pas leur proximité avec les nouvelles technologies. D’autre part, le fait de sortir de l’adolescence les rend plus responsables, posés, prudents, et leurs centres d’intérêt vont inévitablement changer.
Pour mieux comprendre, rappelons ce que l’étude Life Observer nous livrait à propos des attitudes et comportements des générations.

Les 18 à 24 ans (la génération Z) se sentent mal à l’aise sans leur smartphone. Ils ont beaucoup de temps pour des activités de loisirs comme le sport, le cinéma ou les sorties. Ils sont également des « heavy users » de médias sociaux comparés aux autres cibles. En proportion, ils regardent cependant plus de télévision (45 % de leur temps vidéo) que de vidéos sur internet ou les médias sociaux, et le « on demand » payant remporte également un certain succès.

Les 25 à 34 ans (la génération Y) sont peut-être les plus convaincus par les appareils intelligents. Ils sont déjà bien présents sur le marché du travail, mais beaucoup d’entre eux habitent toujours chez leurs parents. Ils balancent entre médias linéaires et non linéaires. La télévision représente 57 % de leur temps vidéo, et la durée de vision sur leur smartphone diminue déjà conséquemment, car ils ont moins de temps pour cela sur leur lieu de travail.

Les 35 à 44 ans (les Xennials – à cheval entre Millennials et la génération X) ont grandi dans un monde analogique et sont à présent adultes dans un monde numérique. Ils sont donc très à l’aise avec les deux types de médias. Ils représentent le cœur de la population active, et ce sont souvent des parents dans cette tranche d’âge, plus responsabilisés que la génération Y. Ils ont une claire préférence pour les médias linéaires, et ceci est sans doute lié à leur mode de vie plus responsable, avec des enfants, à la maison dans le cocon familial. La télévision représente 73 % de leur temps vidéo.

Les 45 à 54 ans (la génération X) est plutôt prudente par nature, et moins concernée par les technologies. À ce stade de la vie, ils aiment se sentir bien chez eux et commencent à un peu moins sortir pour privilégier les activités à la maison. La télévision représente 80 % de leur temps vidéo.

Les 55-64 ans (les Baby Boomers) sont les moins intéressés par les technologies récentes. Ils ont plus de temps libre consacré aux loisirs et consomment beaucoup plus de médias classiques et linéaires. La télévision représente 86 % de leur temps vidéo.

Compagnie, lieu et types d’écrans

Le share of eye peut se calculer en considérant le « device », le lieu ou la compagnie. La plupart du temps (70%) c’est l’écran de télévision qui est privilégié (ce qui correspond au fait que 71% des programmes regardés sont des programmes de TV). Ceci s’explique également parce que les Belges sont plus disponibles, ou enclins à regarder des vidéos à la maison (88% du temps vidéo).

Un peu plus de la moitié du temps de vision des vidéos (55 %) est également accompli seul. Ceci diffère cependant selon le lieu, le moment de la journée et le type de vidéo regardée. La part de vision en compagnie de personnes de la famille, et à la maison, augmente en effet sensiblement en soirée, et représente 50 % au Sud et 55 % au Nord. 

Les programmes de télévision sont particulièrement plus regardés en soirée, en compagnie, et sur un grand poste de télévision, alors que les vidéos sur internet ou les réseaux sociaux se regardent généralement seul, à tout moment de la journée, et sur un smartphone.

Cette part de vision en compagnie, en soirée, fait à nouveau écho à l’étude Life Observer qui notait qu’à partir de 25 ans, plus de 30 % des gens prennent leur repas devant la télévision. En commençant une vie active, et en s’installant dans leur nouveau « chez-eux », les jeunes adultes adoptent donc des habitudes de vision différentes. Ils le font en compagnie de leurs conjoint ou enfants, devant un grand écran, et afin de regarder des programmes de télévision. Ils se démarquent alors clairement de leurs cadets de moins de 25 ans.

En clôturant le cycle des Observers, IP Belgium délivre une première étude « share of eye » complète pour la Belgique. Elle nous en apprend un peu plus sur les comportements de vision, et remet en cause certaines idées toutes faites sur les préférences média des jeunes et des moins jeunes.

En bref

  • Les Belges regardent en moyenne 4 heures 46 minutes de vidéo par jour.

  • 71 % de ce temps de vision se compose de programmes de télévision.

  • Le temps total de vision est plus important au Sud qu’au Nord, mais avec un poids équivalent dans les deux zones du pays pour la télévision.

  • Le temps supplémentaire (39 minutes) passé par les francophones à regarder des vidéos sur des plateformes digitales vient s’ajouter, sans réduire l’importance du temps consacré à la télévision.

  • Les 18 à 24 ans sont « heavy users » de médias sociaux, ils regardent cependant plus de télévision (45 % de leur temps vidéo).

  • La jeune population active (35 à 44 ans) a une claire préférence pour les médias linéaires et les programmes de télévision.

  • Les programmes de télévision sont plus regardés en soirée, en compagnie, et sur un grand écran.

  • Les vidéos sur internet ou les réseaux sociaux se regardent généralement seuls et sur un smartphone.